REVUE DE PRESSE

article du journal Logo du journal le Monde du 2 Juin 98. (Article et logo reproduits avec l'aimable autorisation du journal)


 
 
Avis d'pas sage, un festival de fleurs, d'insectes, de mots et de musiques
 
AVIS D'PAS SAGE, Figeac du 29 au 31 mai  
FIGEAC (Lot) 
de notre envoyé spécial 

Champollion, décrypteur de l'écriture égyptienne, est né à Figeac. La cité du Lot, dont la vieille ville est fort bien entretenue, l'en remercie avec un musée, une librairie regorgeant d'égyptologie pour grands et petits, un monument aux morts en forme d'obélisque, des hiéroglyphes qui ornent les boutiques, les cafés... 
Jean-François Prigent est né au Sahara. Il a été décathlonien, guitariste et chanteur rock. Il s'est posé à Assier (Lot), un bourg en hauteur. H y a Inventé jardin dans tous ses états, où l'idée d'un parcours artistique dans un village a fait son chemin. Une autre équipe a pris le relais. Aujourd'hui, après deux ans de silence, Prigent, installé dans la vallée à Figeac, s'est retrouvé l'envie d'un festival différent. Ça tombe bien, la ville avait, comme toutes les villes de France, une envie de festival. A la grande cavalerie, les services culturels ont préféré les fantaisies chercheuses. Avis d'pas sage vient de naître, vendredi 29 mai, pour trois jours: sons, Images, contes, performances, débats, installations. Les directeurs de festivals qui sont musiciens y jouent, la Compagnie Lubat y fait un tour, les DJ's sont japonais. 

André Minvielle inaugure les festivités. Il parle du Béarn, chante en patois, fait des jeux de mots, des jeux de voix. D'un grand sac, il sort un tambour, 
 

 

une guimbarde, un gong. Les gamins, bouche ouverte, ouvrent des yeux comme des billes. Minvielle a une voix, un phrasé comme les chanteurs de jazz ne savent plus les avoir ça rebondit, se faufile dans les interstices harmoniques. Voix toujours, à cinq femmes cette fois pour le Vocal instantané élastique. A capella elles chantent des airs de la région, un paso doble; elles lancent des onomatopées, des noms de légumes et de fleurs, frappent des rythmes avec les mains. En retour, Prigent bidouille avec un système électronique des déformations, harmonisations, échos, boucles. Il y a là une manière culottée de faire bouger la tradition sans la trahir. 
 

D'ECTOPLASMES FANTOMATIQUES, POINT  

Puis on est reçu par les couleurs et les parfums d'une foret vierge dans laquelle se trouvent des ordinateurs. Il y a un accès au site du festival (perso.infonie.fr/ccfigeac01), vivant, ludique, à celui de June Houston, une Américaine qui a installé des caméras sous son lit posé sur des poutres et demande qu'on lui signale l'apparition d'ectoplasmes fantomatiques. On n'a rien vu. Il y a aussi un nid de branchages, amoureusement construit, sur place, par Violaine Laveaux. Il est légèrement éclairé. C'est étrange, délassant. Sur scène, Novèl Optic allume un petit feu de révolution. René Duran déclame en occitan, arpente la scène ; Papillion marque un tempo uniforme sur un assemblage de caisses de batteries et d'objets divers. Ils

sont convaincus, la salle est plus hésitante. Une pause pour rêver avec Microcosmes, le film de Claude Nuridsany et Marie Pérennou. Une pause pour être bousculé avec les mixages improvisés de programmes radio réalisé par Entropie 05-08. 

Avis d'pas sage montre bien ses recherches. Le centre culturel permet un parcours. Il va falloir s'enfoncer dans la ville, pouvoir pousser des portes, emprunter des ruelles pour découvrir la création actuelle. Pour l'heure, retour sur les marches avec Claude Gudin. Il est botaniste, biologiste. Il raconte l'origine des mots, explique ce que sont le datura, la mandragore. Il est minuit, on pourrait l'écouter toute la nuit sous un figuier. Conclusion avec Calosme sycophante. Là, ce sont les insectes qui sont convoqués à partir de textes de Jean-Henri Fabre, mis en chants par Nelly Frenoux et en saxophones par Laurent Bigot. Poésie des mots scientifiques, accompagnement délicat, minimaliste. 
Le lendemain matin, sous la halle de Figeac, c'est jour de marché. On trouve des plants de citrouille, des tomates saint-pierre ou marmande, des salades croquantes, des fleurs par centaines. C'est là qu'Avis d'pas sage commence une autre longue journée avec les radios d'Entropie 05-08 et l'Orchestre de sonocannes, une parade 
électroacoustique. Une confrontation entre anciens et modernes à l'image de ce festival décidément bien parti. 
 

                                  Sylvain Siclier 


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